La Dolce Vita retrouvée dans un roman

Je viens de lire un roman italien charmeur » Le dernier été en ville » de Gianfranco Calligarich. Ce texte est une résurrection. Un miracle.  La première édition de ce récit linéaire est parue en …1973 ! aux éditions Garzanti, après avoir été refusé par plusieurs éditeurs. Puis après un accueil assez moyen à l’époque, ce premier roman  écrit par un  inconnu  de 26 ans , fut comme on dit « épuisé » et a disparu des librairies italiennes.

Gallimard l’a publié en 2021en traduction(parfaite)  de Laura Brignon .

Il faut savoir que rééédité aux éditions Bompiani  46 ans plus tard , ce livre redécouvert (par qui ? mystère..)  triomphe auprès du grand public. On le traduit non seulement dans toute l’Europe mais partout dans le monde.

  Quand on a fini ce « le dernier été en ville », on comprend mieux ce qui a séduit les italiens : Gianfranco Caligarich fait ressurgir avec une sûreté de trait étonnante « la Dolce Vita » de la fin des années soixante à Rome, dont il fut le jeune témoin.

Comme le Marcello Mastroianni de Fellini, Léo « et sa vieille Alfa » est  un journaliste de seconde zone  voué à des tâches subalternes au « Corriere Dello Sport ». Comme Mastroianni il observe et suit fasciné une faune mondaine, juvénile, cosmopolite, alcoolisée, désinvolte , au dandysme facile, qui traverse Rome en voiture décapotable. Et comme Mastroianni, ce jeune homme   côtoie  de jolies filles un peu branques, se retrouve dans des demeures aristocratiques délabrées parmi  des poétesses vraies ou fausses, des américaines avides d’exotisme européen, d’ éternelles étudiantes qui se roulent sur des canapés , ou sont pendues au téléphone dans le couloir.  Elles trainent des soupirants dans des églises fraiches. On croise de   gentils paumés désargentés qui s’invitent à des soirées pour vider le frigo dans la cuisine.  Comme dans « La Dolce Vita » ce petit monde frivole, rigolard, s’entasse dans des taxis, flirte, chahute. Tous ils médisent, friment, se donnent des comédies et passent d’un palais aristocratique à un bar ombreux, de la piazza Navone aux marchandes de légumes du   Campo dei Fiori. Ces fêtards se retrouvent    à l’aube sur    ces places désertes où chantonne le bruit frais des  fontaines. Et comme dans le film de Fellini, il y a soudain un suicide, un vrai.

 De cette galerie de marginaux fêlés émergent deux personnages : Graziano, l’ami exubérant, mâchouillant un cigare, géant   barbu, alcoolique magnifique, querelleur et généreux, ours lyrique et secret derrière ses vantardises. Il cabote et vacille   de bar en bar entre la piazza del Popolo et   « Le Domiziano »  où il tient son quartier général. On l’accompagne   dans une trattoria   de la via del Babuino , dans la caverne d’une discothèque » peuplée de fantômes » où il sème une monstrueuse pagaille. Il   fait des blagues de potache devant le décor baroque d’une basilique façon « I Vitelloni ». Toujours un verre à la main, Graziano    cumule l’impuissance artistique (impossible de terminer son roman mais on se demande s’il l’a même commencé) et l’impuissance sexuelle, un peu comme le Alain  du « feu follet » à la Drieu la Rochelle. Sa fin permettra au romancier de réussir quelques pages poignantes dans la simplicité, la nudité , la sincérité.

Campo dei Fiori

 Mais le plus beau personnage, celui qui apporte sa phosphorescence au récit, son exaltation, son magnétisme, son mystère, c’est sans conteste cette Arianna. C’est le modèle de la femme-enfant, exquise, fantasque, parfaitement consciente de son immense pouvoir de séduction, celle qui dépose ses lèvres sur vous au moment le plus inattendu. Léo en tombe follement amoureux. Cette étudiante en architecture venue de Venise   est un ludion, une fille du feu nervalienne, fragile, capricieuse, elle est la gravité et la fantaisie, la tendresse et l’artifice, la grâce et la sincérité  écorchée  qui fait tenir debout ce   texte dont l’auteur avoue aujourd’hui, dans ses interviews , qu’il n’ a rien d’inventé.

C’est avec cette Arianna que l’auteur réussit cet humour qui frôle des abimes, ces lassitudes tendres, ces pauses et répits dans les ruelles tièdes  et tout ce qui porte des bouffées de bonheur romain. Qu’on ne s’y trompe pas , cette  Rome, en plein été,annonce  subtilement   les morosités et les cafards  d’un proche automne pour  cette  génération qui veut oublier les flaques de sang de la génération précédente, mal sortie de la guerre et du fascisme. 

Ce qui frappe c’est que ces existences individuelles en dérive ne se relient à rien. Il n’y a que les murs couleur cacao de la Ville qui les font tenir debout. Les personnages   se raccrochent à quelques souvenirs de province, à des parents mal compris qui subsistent en remords, oublient mal des flirts vite éteints, ce sont des petites planètes se frôlant dans le vide. Au fond, cette génération perdue, jouisseuse, ironique dans le mal-être, tient sa légèreté et son élégance de la beauté   maternelle de la ville.

C’est le meilleur de ce livre, le chant à la beauté de Rome. Les ivresses répétées chaque nuit, les réveils gueule de bois n’effacent jamais la beauté lipide  de Rome renouvelée chaque matin sous les platanes qui bordent le Tibre.

Gianfranco Calligarich a le talent de nous faire sentir cette Rome des années fin 60. « Rome porte en elle une ivresse particulière qui brule les souvenirs. Plus qu’une ville, c’est un repli secret de soi, une bête sauvage dissimulée. Avec elle, pas de demi-mesures, ou bien c’est le grand amour ou bien il faut s’en aller, car la tendre bête exige d’être aimée. C’est le seul péage qui sera imposé, d’où que vous veniez, des routes vertes et escarpées du Sud, des lignes droites vallonnées du Nord ou des abîmes de votre âme. Aimée, elle se donnera à vous comme vous la désirez et vous n’aurez qu’à vous laisser aller aux douces vagues du présent, flottant à deux doigts de votre bonheur légitime. Et il y aura pour vous des soirées estivales percées de lumières, de vibrants matins printaniers, des nappes de cafés comme des jupes de filles agitées par le vent, des hivers acérés et des automnes interminables où elle vous apparaitra sans défense, malade, exténuée, lourde de feuilles décapitées sous vos pas. Et il y aura encore les escaliers éblouissants, les fontaines tapageuses, les temples en ruine et le silence nocturne des dieux révoqués, si bien que le temps ne sera plus qu’un élan puéril qui fait trotter les horloges. Ainsi vous aussi, attendant jour après jour, vous deviendrez une part d’elle. Ainsi vous aussi, vous nourrirez la ville. Jusqu’au jour ensoleillé où, humant le vent venu de la mer et regardant le ciel, vous découvrirez qu’il n’y a plus rien à attendre. »

 Plus loin : » Je sautai hors du lit et allai sur le balcon. La vallée se taisait sous le poids du ciel limpide et l’air stagnait, comme dans l’attente d’un présage. »

Il faut dire que, ébloui par la beauté radieuse d’Arianna, cette petite vénitienne capricieuse, intelligente, imprévisible, énigmatique comme certaines héroïnes des nouvelles de Salinger, notre héros alcoolisé la suit dans ses vagabondages : »Nous trainions à la recherche d’églises baroques parce qu’Arianna projetait de faire un mémoire qui démontrerait la supériorité de Borromini sur Le Bernin. »

 Une des pages d’anthologie nous décrit les matinées romaines, les vendeuses qui se parlent d’un pas de porte à l’autre « je prenais le petit déjeuner au café en bas du journal. Les bars avaient un certain air de repentir, peut-être à cause de tout le lait qui débordait des tasses remplies de cappuccino, et seules les viennoiseries froides me rendaient un peu mélancolique. »  Le romancier, nous parle d’une Rome qui n’existe plus, sauf peut-être ,le long du Tibre, un jour de brume en hiver, celle de » la Grande Belleza ».
Pendant ma lecture  je pensais au comédien  Toni Servillo dans le film  de Paolo Sorrentino  interprétant un romancier Jep Gambardella ,celui qui obtint une célébrité dans sa jeunesse avec un unique roman et qui depuis traine son passé avec nonchalance souriante et un navrée . C’est un peu ce qui est arrivé à l’écrivain d’un jour,Calligarich qui, après ce premier roman   étincelant  est devenu un scénariste  pour la RAÏ. Simplement, dans le film de  Sorrentino  Toni Servillo  est   devenu vieux qui   regarde le matin une yole passer sous   le Ponte Sisto avec  une amère nostalgie.

« LA GRANDE BELLEZZA » DI PAOLO SORRENTINO. NELLA FOTO TONI SERVILLO. FOTO DI GIANNI FIORITO

***

Voici ce que dit du roman la traductrice  Laura Brignon :

« Est-ce qu’il y a des éléments dans l’ouvrage qui parlent particulièrement au public français, qui rejoignent un imaginaire que la France a de l’Italie ?

Laura Brignon : Tout à fait, et on le voit par ailleurs dans les premières réactions autour du livre. C’est un texte qui fait appel à un imaginaire très fort en France, et ailleurs : la Rome des années 1960, qui nous fait penser immédiatement à la Dolce Vita de Federico Fellini, et, plus largement à un univers cinématographique. Calligarich a une façon splendide de décrire cette ville, il la rend très vivante et très palpable grâce à la force de son écriture et à son approche. Sûrement que cela peut faire écho à une image réelle ou fantasmée que les lecteurs ont de Rome.

Comment définiriez-vous le style de Gianfranco Calligarich dans ce livre ? Pose-t-il des difficultés spécifiques de traduction ?

Laura Brignon : Je dirais que son style est lumineux, ironique, veiné de poésie, mais aussi pudique. Par exemple, je pense à la scène au début du livre où il dit au revoir à son père, sur le quai de la gare de Milan : cette scène m’a extrêmement émue à la lecture. En traduisant, je réalisais qu’elle reposait sur peu de moyens techniques. L’auteur ne fait pas quelque chose de flamboyant, n’écrit pas des phrases à rallonge utilisant des mots particulièrement complexes ou recherchés : avec des moyens très simples, il arrive à construire en quelques lignes une scène profondément bouleversante. Cette manière de faire tout en sobriété contribue au fait que le roman n’est jamais lourd, même s’il y a des moments tristes ou plus emphatiques, et elle réussit à merveille à communiquer le détachement de plus en plus prégnant du personnage vis-à-vis des choses et des gens.

Avec cette économie de moyens, Calligarich arrive à faire passer des choses d’une grande finesse et d’une grande intensité. Il m’a semblé qu’un des enjeux principaux de cette traduction était donc de garder cette légèreté, de conserver cet équilibre en veillant à ne pas forcer le trait. Il s’agissait de trouver le juste poids des mots et des tournures en français, pour recréer cette lumière, cette espèce de douce mélancolie et de grâce qui se dégage du texte. Il y avait aussi la question de l’ironie et de l’humour, qui représente un vrai enjeu de traduction — de manière générale, traduire l’humour et l’ironie n’est pas ce qu’il y a de plus simple… »

16 réflexions sur “La Dolce Vita retrouvée dans un roman

  1. Pourquoi ce mot « brancal » revient-il si souvent alors qu’a priori il n’est pas français. Est-ce un composé de branque et de bancal ?

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  2. page 201 (folio): « comment Arianna pouvait être amoureuse d’un type aussi brancal que moi »…
    page 207: « je ne me sentais même pas triste. Pas trop du moins. Un peu brancal, ça oui, et à un moment donné, je pris le tram »… »
    Deux exemples d’emploi du mot inventé « brancal ». Intéressants car dans un cas il désigne un trait général du caractère du héros et dans l’autre une humeur momentanée…
    A quel mot italien correspond ce « brancal »? Un seul mot ou plusieurs mots? Inventé aussi en italien?
    Désolé d’être aussi pinailleur pour une chose qui vous paraît peut-être insignifiante…

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  3. Voilà deux livres de suite au taux d’alcoolémie plutôt élevé Paul…Mais autant il faudrait me payer pour que je m’inflige la relecture du Volcan, autant j’ai pris plaisir à lire rapidement le « Dernier été en ville ». Reconnaissons pourtant que depuis Scott Fitzgerald, les romans qui mettent en scène des alcooliques paumés, à demi ou tout à fait fous, dans des milieux de vrais et de faux riches (les faux vivant au crochet des vrais), dont la principale occupation est de trouver le prochain verre ne sont plus vraiment des surprises ! Il y a l’amour, généralement impossible, ou possible un temps sur un malentendu…Comme tous ces gens ne savent pas quoi faire de leur vie et ont perdu tout idéal, ou n’en n’ont jamais eu, cela ne peut que mal se terminer.
    Le plus beau chapitre du livre est la mort de Graziano. J’ai trouvé la fin, notamment la séquence des achats compulsif d’Arianna, un peu tirée par les cheveux. Quant au dénouement…un peu théâtral, non?

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    • Oui, la mort de Graziano est réussie.la fin est un peu en deca de ce qu’on aurait pu attendre. Mais c’est un ivre (pardon livre..)qui reste profondément en mémoire.

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  4. C’est seulement après l’avoir lu que l’on mesure combien il était difficile de rendre compte de ce roman. Sans trop divulguer pour ne pas gâcher la lecture des autres (impossible donc d’évoquer la fin qui me paraît problématique — pour une question de point de vue de la narration).
    Sans se montrer injuste non plus : après tout on ne peut pas reprocher à un roman les éloges qq peu excessifs de certains critiques (je ne pense pas à Paul Edel, sauf s’il fallait comprendre « un miracle » comme se rapportant à la valeur du texte & non à sa seule « résurrection », ce qui m’étonnerait — « charmeur », oui.)
    Ce qui m’a un peu agacée, ce sont les répétitions délibérées de qq expressions. Et pas seulement ce fameux « brancal » mentionné par Closer, « sfinocchiato » en v.o., auquel la traductrice consacre d’ailleurs une réponse étoffée ds l’entretien , mais comme ce passage n’est pas cité par Paul Edel, je vous mets le lien :
    https://actualitte.com/article/99809/interviews/voyage-dans-la-rome-de-gianfranco-calligarich-avec-sa-traductrice
    Elle explique bien qu’il s’agit aussi d’un néologisme & d’un mot-valise en italien. On pense à une variation sur « sfigato » (malchanceux &/ou raté, loser), peut-être aussi (qd il s’agit de personnes) « sfinito » (crevé, épuisé), qui converge avec un autre des refrains du textes « al limite ». Mais on le retrouve aussi bien à propos d’une journée particulièrement pourrie que d’un pantalon… (L’existence de « occhiato », qui signifie ocellé, confère peut-être une sorte de familiarité supplémentaire à la sonorité du mot sans pour autant peser sur le sens, me semble-t-il.)
    Ce que la traductrice ne dit pas (ce n’est pas non plus l’essentiel, mais comme la variation attire forcément l’attention) : finocchio a un sens figuré (tr courant), « homo ». Le mot apparaît d’ailleurs ds ce sens ds une conversation entre Graziano & Leo Gazzara au ch. 7. Je n’en ferais certainement pas une « clef » mais la difficulté des rapports avec les femmes ne concerne pas que Graziano. Même chose pour l’alcool : le thème est décliné chez plusieurs personnages (plus atteint encore, le réalisateur de la télévision), notamment le narrateur.
    Non, la répétition la plus lassante, ce serait plutôt : hisser les voiles; je ne sais pas comment Laura Brignon l’a traduite, mais la proximité avec l’expression française « mettre les voiles » n’aide pas — elle n’a même plus pour elle l’originalité, dès les premières occurrences (& il doit bien y en avoir une quinzaine…)
    Bref, ces « mots de passe » censés révéler une complicité (notamment lorsqu’ils sont adoptés par Arianna à son tour) & la créer par la même occasion chez le lecteur ont eu l’effet inverse sur moi. Même chose pour le « jeu » d’Arianna (voiture jaune, faire un vœu, ne pas desserrer le poing tant que l’on n’a pas rencontré…)
    Parfois, j’ai aussi eu l’impression d’un texte & de personnages qui « cochaient les cases », comme avec la liste des livres de prédilection. On retrouve donc (sans surprise) Lowry & F.S. Fitzgerald d’où l’air de déjà vu du passé psychiatrique d’Arianna, qui avait envisagé d’épouser un médecin, ou Renzo & Viola, « frivoles & sûrs d’eux », qui « fracassent les gens avec une vanne ») mais aussi le reste de ce qu’il faut avoir lu …
    C’est une réaction « à chaud », injuste sans doute (le roman dit aussi, à sa façon, que ces mêmes livres le plombent après tt, & il y a des répliques pleines d’esprit, & le texte a, lui, une « légèreté » au bon sens du terme (ne pas s’appesantir, les échos existent mais ils ne sont pas lourdement soulignés, par ex. entre l’incident en boîte de nuit & la fin de Graziano).
    (Paul Edel : je ne sais pas si vs vs souvenez que sur la RdL Vanina vs avait recommandé I cattivi Pensieri, de Sandro De Feo, autre roman sur Rome ; j’en avais profité pour suivre ce conseil — là aussi, les virées à la mer, un aristocrate désargenté, un récit plus bavard sans doute, mais cela fait partie de son charme & de celui du protagoniste, & davantage ancré ds Rome. Si un jour vs en avez le tps & l’envie…)

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  5. Un détail sans importance : il me semble (à moins que j’aie raté un élément de son portrait physique ?) que Graziano n’est pas un géant : je n’ai retenu que sa pâleur, ses doigts maigres (& le fait qu’il a été marqué par la faim connue ds l’enfance). La barbe va & vient (il la laisse pousser puis la rase qd il se met à l’écriture du scénario). Le très grand, ce serait plutôt le beau-frère d’Arianna, le joueur de tennis.
    Mais de la part d’un lecteur, faire du personnage de Graziano, qui est si « démesuré », un géant c’est rendre une sorte d’hommage au roman.

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  6. En relisant* : j’ai retrouvé le « géant barbu », c’est le réalisateur présenté à Leo par son ami Renzo (au ch. 2) & que l’on retrouvera, ds une scène forte, lors du 1er & unique jour de travail de Leo à la télévision. Une sorte de double de Graziano, & de Leo, mais d’une autre génération, celle de Renzo — ce qui en fait une figure d’autant plus inquiétante : il ne suffit pas de passer ce fameux cap des 30 ans & d’avoir donné des preuves de son talent.
    (On peut se demander si un autre comparse, le champion de tennis assez esquinté par son mariage avec la sœur aînée d’Arianna & resté ds le groupe, ne représenterait pas lui aussi une forme d' »avertissement » ?)
    * « ce récit linéaire », oui, mais aussi cyclique, en boucle. Si l’on revient aux premiers paragraphes, on redécouvre (on lit avec un autre œil) l’épisode de l’eau de mer rapportée au grand-père par ex.

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  7. Moi aussi, au départ, je me suis fait la réflexion que le roman était faible comparé à Pavese, à celui-ci à celui-là et que Hemingway et que Fitzgerald, et Fellini, et Mastroianni et même Audrey Hepburn (non en Ariane – hoho – mais en Princess Ann), etc …

    Puis au fur et à mesure, le charme du livre m’a gagné car je me suis délestée de tous mes bagages, de mes chaussures, et de mes manteaux et me suis laissée porter. (parce que oui, ces errances nocturnes et noctambules, Arianna, Graziano, Rome et la Place Navonne)

    et je l’aime bien, moi, cette séance de shopping un peu artificielle, mais frénétique et idiote – comme un cheveu sur une glace – qui accélère la fin du livre, rapproche et défait les amants.

    Bref, j’ai refusé de bouder et snober mon plaisir.

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  8. Deux précisions : je me réjouis que ce roman ait été réédité & je ne regrette certainement pas de l’avoir lu grâce à vs deux — votre « signalement » initial, Margotte, & l’article de Paul Edel qui s’en est suivi. Merci.
    J’aimerais bien être au diapason de l’enthousiasme de Gabrielle Napoli sur En attendant Nadeau & Mediapart (« chef-d’œuvre de poésie et de finesse », « délice de lecture », « la magie du roman de GC et sa sensualité », « inoubliable ») — ce n’est pas le cas, mais ça ne veut pas dire que je ne trouve pas à ce roman tt un tas de qualités.
    Je suis donc la seule à avoir un problème avec la fin — je ne parle pas de la séance de shopping — & aussi à me demander en conséquence d’où parle le narrateur ?
    Mais je ne vais pas recommencer à casser les pieds de tt le monde.

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  9. Personnellement, je rend à César ce qui est à César et salue bien bas le formidable travail de lecture des médiathécaires de la ville où je vis et qui, chaque année, au début de l’été, proposent un petit catalogue fort bien conçu de notices d’ouvrages récents ou anciens qui leur tiennent à coeur.
    Nous ne partageons pas toujours les mêmes appétences, les mêmes points de vue et goûts, mais sans cette équipe pleine d’allant et son sens du partage, je n’aurais sans doute pas été vers ce roman.

    Quant à cela : « à me demander en conséquence d’où parle le narrateur ? » : vaste question (que je ne me suis pas posée, j’avoue). 😉
    je dirais … la magie et le grand pouvoir de l’écriture (et du cinéma – car le procédé a également été utilisé à maintes reprises. exemple « Sunset Boulevard » de Billy Wilder) ? L’écrivain fait parler les morts … A moins que la fin ne soit ouverte et la noyade manquée ?

    En fait, ce que j’aime dans ce roman c’est qu’il est plus charmant, plus solide, plus profond, plus marquant qu’il n’y paraît de prime abord.

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  10. Faire parler les morts, un privilège de la fiction parmi d’autres, vs avez parfaitement raison.
    (Plus généralement : refuser la suspension volontaire de l’incrédulité ce ne serait même plus bouder/snober son plaisir, ce serait être à côté de la plaque & se tromper de catégorie ; & ds ce cas-là en effet, il vaudrait mieux faire autre ch que lire des romans ou regarder des films).
    Tr bon exemple, Sunset Blvd, de discours post mortem & de manipulation (du spectateur), de « cachotterie », pour le plus grand plaisir du même spectateur.
    Pourquoi alors objecter ds un cas & pas ds un autre ? — bcp d’autres sans doute ; j’avais pensé de mon côté, mais c’était moins bien ajusté, au film American Beauty (toutefois je n’étais plus très sûre ne l’ayant pas revu depuis sa sortie en salle) & pour les livres à un ch. de Mon nom est Rouge de Orhan Pamuk (celui raconté par le mort), mais comme il s’agit d’un roman polyphonique, ce n’est pas vraiment comparable. (Encore moins How the Dead Live de Will Self, mentionné simplement pour montrer que ce n’est pas sur l’invraisemblable en soi que je butte).

    La différence & le problème (pour moi) : question de ton, de genre &, aïe, poussée ds mes retranchements il faut bien que je le dise, de morale de la forme.
    Je ne parle pas du « medium », mais il est possible que j’aie trop négligé cette proximité à l’univers du cinéma, pourtant soulignée par Paul Edel à propos de la biographie de l’auteur & qui est aussi un thème présent ds le texte (écriture du scénario). Par ailleurs je ne suis pas assez calée en matière de cinéma pour avoir qqch de tr pointu à dire sur la morale du travelling (& du reste) — tt juste capable de repérer des manipulations grossières du type ralenti &/ou musique sentimentale ou « dramatique » (parce qu’elles me hérissent).
    Ici, me dérange la COMBINAISON d’une narration à la 1ère personne (je crois que, par rapport au dénouement, c’est là que le bât blesse le plus : hautement casse-gueule) + l’explicitation (& les modalités) du geste final
    + le thème du suicide déjà utilisé
    + le leitmotiv « al limite »/ »au bout du rouleau »? (je ne sais pas comment L. Brignon l’a traduit) d’où un effet « je vs l’avais bien dit »
    (mais je n’ai pas vérifié s’il était uniquement associé à Leo ou s’il circulait entre les personnages)
    + la boucle soigneusement bouclée avec dissimulation initiale (préméditation formelle vs. raptus ds l’histoire racontée, sur le plan de l’existence du protagoniste).

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  11. Je vous prie de bien vouloir m’excuser pour mon opiniâtreté — le besoin de se justifier peut, lui aussi, devenir une intempérance (pénible pour les autres).
    Une cure de désintoxication s’impose, ainsi qu’une visite au plus proche chapitre des A.A. (Accaniti Anonimi/Acharnés Anonymes).

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