Je me lève…j’écoute la radio dans la salle de bains.. déplacement des populations….on parle de bombes incendiaires russes larguées sur une ville d’ Ukraine…. T’allume la télé…kibboutz dévastés, un sombre nuage monte au ralenti au-dessus d’habitations étagées sur l’horizon…populations massacrées.. une espèce de Saint-Barthélemy est tombée du ciel sur une rave party .. et tout au long de la journée.. images télévisées en boucle.. un curieux état de dégoût saisi.. d’abord imperceptible ..diffus.. balbutiant…puis sentiment d’être saisi dans un étau.. honte d’être un animal humain dans cette débâcle.. un chaos grandit en soi…une sidération….un vertige.. j’essaie de lutter contre une nausée intérieure qui s’entend, grandit et en même temps que j’essaie de me dissimuler.. en vain…. est-elle intérieure ou extérieure ? Quelque chose d’animal, d’instinctif ? Un état mental ? Une hallucination kinesthésique ? Quelque chose de psycho somatique?…qu’est-ce qui s’empare de vous.. harcèle.. dérègle.. est-ce la réalité ou ,l ’irréalité ce que je vois ?.. ces nuages de poussière.. ces avenues dévastées…aplaties…ce désert de décombres.. ces gens qui fuient en troupeaux.. honte d’être humain.. Ici en Bretagne je marche le long de pimpantes villas…c’est elles qui sont fausses ce matin….décor de théâtre.. .impossibilité ce matin d’une pensée naturelle, claire.. construite… toutes les impressions se dédoublent ..les paroles se vident de consistance…de mesure.. de bon sens.. elles se dissolvent … le monde devient curieusement artificiel…impossible… et se vide de sa familiarité …. Comme si on était plongé dans une irréalité visqueuse… cotonneuse.. . obèse… Un mélange de stupeur.. et d ‘incrédulité saisit.. incompréhension de tout.. . et ce sentiment nauséeux casse tout ce qu’il y a de rassurant dans les raisonnements qu’on se fait pour se rassurer… une espèce d’irréalité trouble…terrible gagne le corps, les sensations se corrodent. . Des agonies sans cesse quelque part.. sans cesse…les idées de fermeté et d’efficacité…les opinions simplistes se trouent comme du papier journal.. corrompt toue pensée naturelle et vive et l’asphyxie .

Je me souviens d’une réflexion de Witold Gombrowicz qui m’avait beaucoup frappé il y a des années. J’ai feuilleté son « Journal », tome II et je l’ai retrouvée: « Ose le dire encore une fois pour toi-même : plus que le malheur d’autrui, ce qui me tourmente c’est de ne pas savoir quoi faire de toi face au malheur d’autrui. »
Pour ma part, je ressasse, mâche et remâche les propos de la femme Narsès : « Comment cela s’appelle-t-il, quand le jour se lève, comme aujourd’hui, et que tout est gâché, que tout est saccagé, et que l’air pourtant se respire, et qu’on a tout perdu, que la ville brûle, que les innocents s’entretuent, mais que les coupables agonisent, dans un coin du jour qui se lève ? ». (« Electre » de Giraudoux)
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Witold Gombrowicz « Ose le dire encore une fois pour toi-même : plus que le malheur d’autrui, ce qui me tourmente c’est de ne pas savoir quoi faire de toi face au malheur d’autrui. »
Tout semble superfétatoire. Prendre parti, ne pas, raisonner, ne pas, juger, ne pas, analyser, ne pas. Impuissance totale pour ma part face aux malheurs du monde, incessants, dans une succession intenable.
Merci, Paul, pour la réflexion de Gombrowicz.
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En antidote, soyez célinien. Pas par nihilisme.
Un peu par désespoir, car celui de Céline me semble plus vivable que de ce que vous décrivez.
Surtout par conscience historique. Après tant de massacres au compteur, l’Humanité vous surprend encore ?
Pas de contresens ici. Ce n’est pas de la sècheresse de cœur. J’ose seulement prétendre à une certaine lucidité…
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